Octobre en lectures

Avec mon nouveau boulot, j'ai sensiblement augmenté mon temps quotidien de lecture, ce qui m'a permis de lire en octobre 6 romans complets jusque là, ce qui n'est pas mal pour une période travaillée. Nouveauté également, je lis de la littérature "non-jeunesse" (Clémentine Beauvais a parlé récemment d'édition vieillesse, sur Instagram, ça m'a fait rire), un autre effet collatéral du nouveau boulot.

5 de ces romans sont des romans d'auteur·e·s français·e·s, en lice pour le Goncourt des Lycéens (mais la plupart sont aussi sur la liste des 15 finalistes pour le Goncourt tout court). J'ai eu envie de les lire parce que j'ai eu la chance de rencontrer leurs auteur·e·s ce mois-ci et qu'iels ont su éveiller ma curiosité.

Mon chouchou jusqu'à présent est "Leurs enfants après eux" de Nicolas Mathieu qui raconte l'adolescence d'une bande de jeunes qui vivent à la campagne, en Moselle dans les années 90. L'ennui, les émois amoureux, les expériences, les bagarres, les joies et les drames de ces ados "ordinaires" sont racontés avec une écriture ciselée, un véritable travail d'orfèvre où chaque mot est choisi avec soin pour des phrases qui sonnent toujours juste. Je n'avais pas lu quelque chose d'aussi bien écrit depuis bien longtemps, je suis séduite.

"La révolte" de Clara Dupont-Monod m'a beaucoup moins plu. C'est un roman historique narré par Richard Coeur de Lion et qui raconte comment il entre en guerre contre son père pour venger sa mère, la belle Aliénor d'Aquitaine. Ce personnage épique aurait pu donner tout son piquant à l'histoire mais j'ai trouvé que ce roman à voix multiples tournait en rond, malgré quelques beaux passages.

J'ai ensuite lu "Dix-sept ans" d'Eric Fottorino, qui raconte l'histoire de sa mère qui avait 17 ans en 1960. Suite à la révélation par sa mère d'un secret, l'auteur part à Nice sur les traces de sa naissance et remonte le cours des évènements, pour pallier le manque de communication avec une mère qui cultive à dessein les secrets et les silences. Certains passages sont poignants mais j'ai été déçue par des longueurs inutiles et la part trop importante faite à l'extrapolation.

Le roman "Frères d'âme" de David Diop, lui, m'a enthousiasmée par son style et son écriture quasi hypnotique. Ce roman raconte la guerre dans les tranchées d'un tirailleur sénégalais qui, pour ne pas devenir fou, fait semblant de le devenir en cultivant une forme de cruauté qui fait peur à ses congénères. Un très beau roman.

J'ai enfin terminé ce matin le roman social "L'ère des suspects" de Gilles Martin-Chauffier, qui narre à plusieurs voix un fait divers imaginaire survenu dans une cité, la mort d'un petit voyou qui avait eu maille à partir avec un jeune gardien de la paix peu de temps auparavant et tout le ramdam politico-médiatique qui en a suivi, dans le contexte post attentat de Nice. Un peu à la manière d'un roman policier, les différents protagonistes de l'histoire narrent leur histoire, dressant un portrait à charge de la France d'aujourd'hui où tout le monde est suspect de quelque chose. J'ai trouvé ce roman très prenant au final mais je suis assez surprise de le voir figurer dans la liste des Goncourables : facilités de style (avec des comparaisons redondantes, souvent) et puis une avalanche de personnages très stéréotypés. Je suis un peu perplexe...

Le 6e roman que j'ai lu ce mois hors Goncourt est "L'hibiscus pourpre" de C. Ngozie Adichie, une auteure féministe nigériane que j'apprécie beaucoup. Il raconte l'histoire de Kombili, une jeune collégienne de 13 ans qui vit dans l'ombre terrorisante de son père, fondamentaliste catholique, dans un contexte de coup d'état. C'est glaçant et très juste, on ressent bien les tiraillements de cette jeune fille partagée entre sa loyauté envers un père abusif et le reste de sa famille, qui essaie de la sortir, elle, sa mère et son frère, de ce contexte familial toxique. La place de la religion est elle aussi questionnée, avec des allers-retours permanents entre le catholicisme radical du père et la religion plus traditionnelle du grand-père. Un très beau portait d'ado.