Intelligence Artificielle: le grand fourre-tout

L'IA existe depuis 1960: elle a toujours eu pour objectif de reproduire certaines (très peu en fait) facultés cognitives de l'Homme, et surtout la perception, la vision, l'audition, le langage, le calcul, les jeux, la logique, la mémoire, etc. On parlait alors d'IA symbolique, puis d'IA statistique dans les années 80 et 90. Mais un véritable bon en avant dans les performances de la vision, de la reconnaissance de la parole et des jeux a été réalisé après 2010 grâce à un nouveau type d'IA: le deep learning.

Mais ce terme de "deep learning" passe mal dans le grand public, et les medias l'ont occulté au profit du terme plus général d'IA. Le progrès réalisé grâce au deep learning a été si grand que tout le monde s'est donc mis à parler d'IA, qui est devenu aujourd'hui une véritable bulle médiatique, prête à exploser. Après les médias, les financeurs ont mis la main à la poche, appâtés par tant de progrès potentiel. Immédiatement, tous les scientifiques faisant de l'IA, au sens large (et même encore plus large !) se sont engouffrés dans la brèche pour réclamer une part de la manne financière, au nom de l'IA qu'ils sont censés représenter. Mais la majorité de ces scientifiques sont en fait du domaine de l'IA symbolique, ou statistique, et il y a très peu de vrais experts en deep learning. Or, cela fait plus de 40 ans que la "vieille" IA existe, et je doute fort que, malgré ce nouvel afflux d'argent, elle produise des avancées aussi spectaculaires que celles du deep learning. J'observe donc aujourd'hui en réalité un détournement des investissements vers de vieilles technologies, au nom de l'IA, qui aboutiront vraisemblablement à une sévère désillusion dans peu de temps, et une opprobe jetée sur tous les scientifiques en IA, sans distinction.

Alors que au contraire, il faudrait investir dans le deep learning, et surtout dans la formation en deep learning, afin de produire de nombreux et nouveaux talents dans cette nouvelle discipline si prometteuse. Mais les ego et les habitudes des "vieux mandarins", si prompts à défendre leur chapelle et leur position dominante se sont mis en travers du chemin du progrès, au moins dans la vieille Europe. La question est très différente aux USA, où la prise de risque est valorisée, et en Chine, qui privilégie l'efficacité même au détriment du social.

Attention, je ne dis pas que le deep learning n'a que des conséquences positives, et comme tout nouveau pouvoir, il est le plus souvent utilisé à mauvais escient et peut faire beaucoup de mal; il faut donc se protéger à tout prix de l'hyper-centralisation de ce pouvoir aux mains d'une minorité, mais c'est un autre débat, pour un autre billet.